Toujours en quête d’informations sur les mondes issus de la Séparation, Haplo entame son troisième voyage à travers les portes de la mort. Malheureusement (ou heureusement ?) un voyageur clandestin va venir avec lui sur Abarrach, le monde de pierre. En atterrissant sur un monde sans chaleur ni lumière ormi une gigantesque mer de lave produisant des fumées mortelles, ils ne pensaient certainement pas découvrir les derniers survivants d’une civilisation oubliée. Car la mer de feu est leur seule source d’énergie et elle se rétracte, entrainant dans son ancien lit la désolation. (Attention le reste du texte comporte des éléments pouvant altérer le suspens)
Dans cette atmosphère viciée, quatre personnages vont faire face, chacun à leur manière au déclin assuré. Edmund, le prince de Cairn Telest choisi d’abandonner sa ville désormais prise dans les glaces pour guider son peuple vers Cairn Necros, plus près de la mer de feu. Il est conseillé dans son exode par Balthazar l’érudit et nécromant du roi qui cherche à comprendre pourquoi les Colosses sensés diffuser l’énergie de la vie sont défaillants. C’est à Safe Harbor, sur les rives de la mer de feu face à Nécropolis que le peuple de Cairn Telest doit faire face à Jera et Jonathan, deux nécromants à la tête d’une armée de mort. Ces renégats vont les conduire à Nécropolis, pour rencontrer le souverain Kleitus XIV 1 et lui demander son hospitalité. L’intervention du couple dont chacun semble représenter une facette d’une seule et même âme va se montrer cruciale pour accomplir la Prophétie d’Abarrach.
Ce troisième tome du cycle des Portes de la mort nous entraîne sur le chemin tortueux de la nécromancie. On y découvre comment un peuple en déclin a placé son salut dans la magie interdite pour ressusciter les corps et compenser ainsi la faible natalité. Les magiciens nécromants ont déjà crée une armée d’esclaves : travailleurs ou soldats. Mais l’entretien de ces cadavres animés est coûteuse en magie — mais est-ce le seul prix à payer ? — et les maigres ressources de la planète continuent de disparaître. Et déjà les morts semblent plus nombreux que les vivants.
Le thème de la mort est évidemment très présent ici, ce qui le rend parfois assez lugubre. Mais le traitement que proposent Weis et Hickman est assez subtile. Abarrach n’est pas un monde manichéen. Nous y retrouvons Alfred, le Sartan rencontré sur Arianus. Celui-ci se pose souvent la question « A leur place qu’aurais-je fait ? ». Le roman se compose plus d’un voyage intérieur, une réflexion sur ce que serait la vie après la mort : une vie du corps ? Une vie de l’esprit comme tendent à le montrer les lazars, créés par mégarde ? La résurrection est-elle une victoire ou le pire de nos cauchemars ?
L’autre thème, cette fois récurrent dans le cycle de les Portes de la Mort est le dragon. Après DragonWing sur Arianus où le dragon est dompté et asservis par magie pour servir de monture, sur Pyran, nous avions découvert un tout autre dragon : le familier de l’énigmatique magicien Zifnab. Sur Abarrach, les dragons ont été anéantis par l’homme et une seule créature semble avoir survécu. Elle vit dans le mer de feu et demande un tribut de temps à autre. Celle-ci n’est donc pas domptée, possède son libre arbitre et pourrait s’avérer encore une fois un atout crucial pour la réussite de la mission d’Haplo. Ce que laisse d’ailleurs très bien supposer la couverture choisie par Bantam Books pour illustrer le roman.
Et enfin la prophétie et la prémonition sont une clé de lecture importante. Tome après tome, on semble se rapprocher d’une grande thèse : une puissance plus importante que Sartan et Patryn, les demi-dieux. Pour la première fois dans Fire sea, le thème est ouvertement abordé par Jonathan, Haplo et Alfred lors de leur expérience troublante dans la Chambre des damnés.
Bref, à ce stade Fire Sea est le livre du cycle que je préfère. Le déroulement est subtile et inattendu. Le style est fluide et agréable. Un roman qu’on a du mal à reposer. A recommander, même s’il n’a pas vraiment d’intérêt hors du cycle. Si vous avez déjà lu Elven Star, poussez jusqu’à Abarrach, le voyage vous plaira sans aucun doute.
Margaret Weis & Tracy Hickman
Fire sea, The death Gate Cycle – book 3
Bantam Books | ISBN 978-0553295412
La Mer de feu, Les portes de la mort, Tome 3
Pocket Fantasy | ISBN 978-2266159456
Autre avis : Good reads
- Une référence à un certain Louis, quatorzième du nom ? C’est possible car Kleitus représente ici le pouvoir absolu↩
Quelque chose à dire ?